Nellie et Joon Pyo - Tome 1 by Sylvie Payette

Auteur:Sylvie Payette [Payette, Sylvie]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Jeunesse
ISBN: 9782764438497
Éditeur: Québec Amérique
Publié: 2019-08-08T04:00:00+00:00

Chapitre 16

En arrivant au domaine par la porte de la cuisine, j’ai voulu appeler Marily pour lui raconter ce que j’avais découvert, mais j’ai été interrompue par l’arrivée de Mireille, poussant devant elle le jeune Valmont.

Je me suis arrêtée, prenant tout à coup conscience de la gaffe que j’avais failli commettre. On devait être prudents, ne rien dire sans vérifier d’abord qu’aucun intrus n’écoutait.

— Nellie ? Ça va ? Tu es devenue toute pâle, a demandé Mireille, soucieuse.

— Je n’ai pas encore mangé, ne t’inquiète pas. Tu as de la visite ? ai-je lancé en avançant vers le jeune homme.

Il rougissait un peu en me saluant. Bien entendu, pour lui, je devais être la princesse de Blois et d’Arthabaska. Les jeunes aristocrates avaient été élevés ainsi. Même si Henri faisait partie des républicains qui avaient provoqué la fin de la monarchie, les nobles continuaient de le respecter pour son titre. Henri répétait souvent que c’était parce qu’ils espéraient qu’il change d’idée et reprenne un jour le rôle de son père.

C’est vrai que, s’il existait une personne capable de faire l’unanimité auprès de la population et des aristocrates, c’était Henri. Dans leur rêve de revenir en arrière, ils voyaient déjà en Henri leur futur roi.

J’en avais entendu parler, mais je le voyais clairement dans le regard et la révérence de ce jeune comte.

— Nellie, tu te souviens de Valmont ?

— Bien sûr. J’espère que vous avez aimé notre réception.

— C’était une soirée remarquable. Je vous remercie de nous avoir invités. Nous aurions regretté de ne pas assister à un moment aussi inoubliable. La comtesse, ma grand-mère, en parlait encore au déjeuner. Vous lui avez rappelé les grands bals de sa jeunesse.

Je n’osais pas l’interrompre, mais je sentais Mireille trépigner. Elle avait hâte de repartir, une fois les présentations effectuées.

— Valmont est venu me voir. Il avait promis de me montrer à calligraphier les lettres majuscules. On ne nous les enseigne plus à l’école.

— Comment écrira-t-on de la poésie ? a demandé Valmont, offusqué.

J’ai souri, jugeant inutile de lui répondre que, d’où je venais, cette calligraphie n’existait plus vraiment et qu’on écrivait tout de même de magnifiques poèmes.

Plusieurs jeunes aristocrates avaient suivi le mouvement de la république et avaient même participé aux changements tant attendus. Il existait des nobles très intelligents parmi la nouvelle génération… Pourquoi avait-il fallu que Mireille tombe sur une coquille vide ?

Si elle réussissait à le séduire, peut-être arriverait-elle à ouvrir une petite fenêtre dans son cerveau, qui lui permettrait de voir le monde autrement. Pour qu’il l’aime, il devrait d’abord oublier les classes qui divisaient cette société depuis trop longtemps.

Je les ai laissés retourner au salon, où les encriers et les plumes les attendaient, sur la table ronde. Ils se sont assis comme deux enfants sages. Je me sentais beaucoup moins inquiète. Si Valmont était un véritable gentilhomme, il ne chercherait pas à profiter de la situation.

Je me suis enfermée dans le bureau. Pyo et Marily sont venus me rejoindre après quelques minutes. Elle avait été mise au courant par mon ami de ma découverte et je lui ai montré la liste.

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